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Être bien au travail

Caméras de surveillance au travail, que dit la loi ?

Par Laurence Chavaroc Publié le

Entre besoin de sécurité et respect de la vie privée, la surveillance vidéo au travail reste un sujet sensible… mais rigoureusement encadré par la loi

Caméras de surveillance au travail, que dit la loi ?
On répond à toutes vos questions sur le sujet. © Jatumeth/stock.adobe.com

Caméras dans les bureaux, surveillance des entrées ou des parkings, dispositifs de sécurité dans les entrepôts… la vidéosurveillance s’invite de plus en plus dans l’environnement professionnel. Mais cet équipement, s’il est mal encadré, peut vite basculer dans l’atteinte à la vie privée. Peut-on filmer partout, tout le temps, et tout le monde ? Jusqu’où peut aller un employeur ? Quels sont les droits des salariés ? Et que dit précisément la loi ? Le point dans cet article.

La vidéosurveillance au travail : un cadre légal strict

La législation en vigueur sur l’usage des caméras sur le lieu de travail

L’installation d’une caméra de surveillance au travail entre dans un périmètre légal bien défini. Trois références principales encadrent cette pratique : le Code du travail, le Règlement général sur la protection des données (RGPD) et le Code pénal.

Le Code du travail fixe les conditions d’usage afin de garantir que la vidéoprotection ne porte pas atteinte aux libertés individuelles. L’article L1121-1 rappelle que toute restriction doit être justifiée, proportionnée et liée à la tâche à accomplir. Par exemple, il est strictement interdit de filmer en continu dans un open space ou une salle de pause.

Le Règlement général sur la protection des données, quant à lui, impose des règles strictes sur la collecte, le traitement et la conservation des données personnelles issues d’une caméra de surveillance. Il garantit aux salariés un droit à l’information, un accès aux enregistrements les concernant, ainsi que des mesures de sécurité renforcées.

Enfin, le Code pénal protège la vie privée des individus, notamment via l’article 226-1, qui interdit l’enregistrement ou la diffusion d’images d’une personne se trouvant dans un lieu privé, sans son consentement, ce qui s’applique également à la sphère professionnelle.

Les obligations juridiques de l’employeur

Avant d’installer des caméras, l’employeur doit respecter plusieurs obligations légales :

  • informer les salariés individuellement et par écrit de l’existence de l’équipement, de ses finalités, des lieux filmés, de la durée de conservation des images et de leurs droits, conformément à l’article L1222-4 du Code du travail
  • consulter le Comité Social et Économique (CSE), comme expliqué dans l’article L2312-38, pour tout projet susceptible d’avoir un impact sur les conditions de travail, tel qu’un équipement de vidéosurveillance
  • inscrire ce dispositif dans le registre des traitements de données personnelles, conformément à l’article 30 du Règlement général sur la protection des données. Ce registre doit contenir une description détaillée du système, les personnes ayant accès aux enregistrements, et les mesures de sécurité mises en place
  • respecter le principe de finalité. Si l’objectif de cette installation déclarée est de protéger les locaux, il est interdit d’utiliser les enregistrements pour contrôler les performances individuelles des salariés, sauf si cette finalité a été explicitement annoncée.

Les zones autorisées et interdites à la vidéosurveillance

Si la loi sur les caméras de surveillance au travail autorise bien le contrôle vidéo de certains espaces collectifs, elle fixe des limites claires pour protéger l’intimité des employés. La captation vidéo dans les locaux professionnels se limite à certains espaces à usage collectif. L’entrée des bâtiments, les parkings, les zones de stockage, les issues de secours ou encore les caisses dans les commerces figurent parmi les lieux où la vidéosurveillance peut être installée de manière licite.

En revanche, certains lieux sont strictement interdits à la vidéoprotection, même en cas de soupçon d’abus : locaux syndicaux ou des représentants du personnel, toilettes, vestiaires, salles de repos, réfectoires ou tout lieu relevant de la liberté individuelle. Ainsi, toute installation de caméra dans ces lieux constitue une atteinte directe à la vie privée des employés, punie par l’article 226-1 du Code pénal.

La surveillance directe des postes de travail n’est tolérée que dans des situations bien spécifiques : manipulations dangereuses, surveillance de machines automatisées, ou encore travail dans un lieu isolé. Dans ces cas précis, l’employeur doit démontrer que la surveillance est indispensable à la sécurité.

bon à savoir

Un employeur ne peut pas s’appuyer sur des images issues d’un système installé hors cadre légal pour justifier une sanction disciplinaire. La preuve sera considérée comme irrecevable.

Les droits des employés au regard de la vidéosurveillance au travail

La loi garantit aux employés un ensemble de droits concrets, destinés à protéger leur liberté individuelle et leur dignité :

  • droit d’accès aux enregistrements : tout salarié peut formuler une demande pour consulter les enregistrements sur lesquels il apparaît, en vertu de l’article 15 du RGPD. L’employeur est tenu de répondre à cette demande dans un délai raisonnable (un mois maximum), sauf motif légitime de refus
  • en cas de doute sur la légalité de l’équipement : un signalement peut être adressé à l’employeur, au CSE ou directement à la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL), entité chargée de contrôler les systèmes de surveillance dans le cadre professionnel. En cas de manquement, la CNIL peut prononcer des sanctions administratives pouvant aller jusqu’à 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial de l’entreprise
  • en cas de sanction fondée sur des images issues d’un dispositif irrégulier : le salarié visé a le droit de saisir le conseil de prud’hommes. Plusieurs décisions de justice ont annulé des licenciements dans ce contexte, notamment l’arrêt rendu par la Cour de cassation, chambre sociale, le 10 janvier 2012 (n° 10-23.482).

Les risques pour l’employeur en cas de non-conformité

Un employeur qui ne respecte pas ses obligations s’expose à plusieurs niveaux de sanctions :

  • sanctions administratives : un contrôle de la CNIL peut aboutir à plusieurs mesures : mise en demeure, limitation ou interdiction du traitement, voire sanction financière, selon la gravité des manquements. Une mauvaise gestion des obligations d’information peut suffire à déclencher une procédure.
  • sanctions pénales : une captation vidéo jugée attentatoire à la vie privée engage la responsabilité pénale de l’employeur. L’article 226-1 du Code pénal prévoit jusqu’à un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Cette peine est applicable même en l’absence d’intention malveillante, dès lors que l’atteinte est caractérisée.
  • sanctions prud’homales : l’utilisation de visuels issus d’un système illégal ou non déclaré pour appuyer une sanction disciplinaire peut se retourner contre l’employeur. La jurisprudence sociale rappelle régulièrement que la preuve obtenue de manière illicite est irrecevable, y compris lorsqu’une faute avérée est reprochée au salarié. Un licenciement basé sur un tel fondement risque donc l’annulation.

bon à savoir

Même un système installé de bonne foi par l’employeur peut être sanctionné s’il n’a pas été suffisamment encadré juridiquement.

Questions fréquentes sur la vidéosurveillance au travail : ce que dit la loi

Comment informer les employés de la présence de caméras de surveillance ?

Un affichage clair et visible est obligatoire dans les lieux surveillés. Ce panneau doit mentionner :

  • la finalité du dispositif installé
  • le nom et/ou le titre et le numéro de téléphone de la personne déléguée à la protection des données (DPO) de l’entreprise
  • la durée de conservation des images
  • les droits d’accès, de rectification et de suppression
  • le droit de déposer une réclamation auprès de la CNIL

Ce panneau ne dispense pas l’employeur d’informer individuellement les salariés et les représentants du personnel.

Dans certains cas, les caméras peuvent filmer au-delà des murs de l’entreprise, par exemple l’entrée d’un bâtiment donnant sur un lieu public ou un parking ouvert sur l’extérieur. Dans ce cas, la réglementation est différente : toute captation d’images sur le domaine public doit faire l’objet d’une autorisation préfectorale, indépendamment des obligations d’information prévues par le RGPD.

Un employeur peut-il filmer sans prévenir s’il suspecte un vol ?

Même en cas de suspicion fondée, il est strictement interdit de mettre en place un dispositif de vidéosurveillance de façon illégale. La jurisprudence est claire : la preuve obtenue par un système non déclaré est irrecevable devant les juridictions (Cass. soc., 20 novembre 2019, n° 18-20.353). L’employeur doit toujours privilégier des méthodes licites, en informant les salariés et en respectant la procédure légale.

Une caméra de télésurveillance peut-elle filmer l’entrée d’un bureau individuel ?

Une caméra orientée vers l’entrée d’un bureau peut être tolérée si l’environnement de travail présente un risque spécifique. En revanche, son angle ne doit pas filmer en continu l’intérieur, sauf en cas de raison sécuritaire clairement justifiée. Dans ce contexte, le principe de proportionnalité s’applique, exigeant que la surveillance des salariés soit strictement nécessaire et limitée au minimum indispensable, garantissant ainsi un juste équilibre entre protection et respect l’intimité des salariés.

Qui peut consulter les images ?

Seules les personnes préalablement habilitées peuvent accéder aux enregistrements. Il s’agit le plus souvent du responsable sécurité, du DRH, ou du DPO (délégué à la protection des données). L’accès à ces données doit être sécurisé, justifié et tracé. Toute diffusion ou consultation abusive est sanctionnable au titre de l’article 226-1 du Code pénal.

Un salarié peut-il refuser d’être filmé ?

Un salarié ne peut pas s’opposer à un dispositif légal, justifié et proportionné. En revanche, il peut exiger l’accès aux images, contester une utilisation abusive, ou saisir la CNIL s’il estime que ses droits sont bafoués. Il peut aussi faire appel au CSE de son entreprise pour une médiation interne.

Faut-il une autorisation de la CNIL pour installer des caméras de vidéoprotection ?

Depuis l’entrée en vigueur du RGPD en 2018, il n’est plus nécessaire de faire une déclaration préalable à la CNIL. En revanche, l’entreprise doit tenir un registre des traitements de données, effectuer si besoin une analyse d’impact relative à la protection des données (AIPD), et être en mesure de prouver sa conformité à tout moment.

Combien de temps l’employeur a-t-il pour répondre à une demande d’accès aux images ?

L’employeur doit répondre dans un délai d’un mois maximum, conformément à l’article 12 du RGPD. En cas de demande complexe, ce délai peut être prolongé de deux mois supplémentaires, à condition d’en informer le salarié. Un refus doit être motivé et fondé en droit.

Pendant combien de temps les images de vidéosurveillance sont-elles conservées ?

La durée de conservation des enregistrements doit être strictement limitée au temps nécessaire à la finalité du dispositif. En général, cette durée varie de quelques jours à un mois maximum.

La télésurveillance peut-elle être activée uniquement en dehors des horaires de travail ?

Oui, c’est même une bonne pratique recommandée par la CNIL : activer le système en dehors des heures de présence pour éviter toute captation inutile de l’activité des salariés. Cette approche permet de limiter les atteintes à l’intimité tout en maintenant un niveau de protection satisfaisant dans les locaux.

Une entreprise de moins de 50 salariés est-elle concernée par les mêmes règles ?

Le RGPD s’applique à toute entreprise, quelle que soit sa taille. Bien qu’un CSE ne soit pas obligatoire en dessous de 11 salariés, cela ne dispense pas l’employeur de respecter les droits individuels des salariés à la vie privée et à l’information.

Qu’en est-il de la surveillance audio ? Est-elle autorisée ?

La surveillance par enregistrement audio est, dans la grande majorité des cas, strictement interdite. Considérée particulièrement intrusive, elle fait l’objet d’un encadrement très rigoureux par la CNIL. Seules quelques exceptions sont tolérées, notamment pour des raisons de sécurité dans des secteurs sensibles ou à haut risque (établissements pénitentiaires, sites industriels à risque…).

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